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Dossier

Questions d’in-disciplines

Genèse et transgressions des frontières de la sociologie de l’art et de la culture
Questions of In-Disciplines. Genesis and Transgressions of the Boundaries of the Sociology of Art and Culture
Cuestiones de in-disciplinas. Génesis y transgresiones de las fronteras de la sociología del arte y la cultura
Jérémy Sinigaglia et Adrien Thibault
Traduction(s) :
Questions of In-Disciplines [en]

Résumés

La spécialisation de la recherche autour d’ordres de problèmes considérés comme spécifiques est une caractéristique forte des sciences sociales telles qu’elles se sont structurées tout au long du XXe siècle. La sociologie de l’art et de la culture est l’un des multiples produits de cette division du travail scientifique. Elle a ses réseaux de chercheur·e·s, ses revues, ses ouvrages de synthèse, ses évènements scientifiques, ses diplômes, son personnel, etc. Or, dans le prolongement de la réflexion de Durkheim, on peut se demander si la sociologie de l’art et de la culture ne doit pas être considérée comme le produit d’une « forme anormale » de division du travail scientifique. Si le présent dossier n’a pas pour objet d’apporter une réponse définitive à cette interrogation, il entend néanmoins la nourrir en présentant des cas de mise en question des frontières institutionnelles existantes, entre disciplines et au sein même de la sociologie. Les cinq articles et l’entretien qui constituent ce dossier, posent ainsi une question fondamentale à la sociologie de l’art et de la culture : celle de la pertinence d’une « partition réelle du réel » (Bourdieu et al. 1968 : 60) comme principe de division du travail scientifique. Les frontières extérieures dont traite ce dossier, qu’elles soient interdisciplinaires ou intradisciplinaires, sont finalement des limites au double sens du terme : possiblement trop poreuses, possiblement trop hermétiques, elles menacent le travail scientifique d’autant plus fortement qu’elles restent méconnues et d’autant plus longtemps qu’elles restent impensées.

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Texte intégral

« Mais, à mesure que la spécialisation s’est introduite dans le travail scientifique, chaque savant s’est de plus en plus renfermé, non seulement dans une science particulière, mais dans un ordre spécial de problèmes. » (Durkheim 2013 [1893] : 347)

  • 1 Association française de sociologie.
  • 2 Association internationale des sociologues de langue française.
  • 3 Federación Española de Sociología.
  • 4 Asociación Latinoamericana de Sociología.
  • 5 European Sociological Association.
  • 6 British Sociological Association.
  • 7 International Sociological Association.
  • 8 American Sociological Association.
  • 9 À l’AFS, par exemple, seuls 12 « réseaux thématiques » sur 50 (moins d’un sur quatre) ne concernent (...)

1La spécialisation de la recherche autour d’ordres de problèmes considérés comme spécifiques est une caractéristique forte des sciences sociales telles qu’elles se sont progressivement structurées tout au long du xxe siècle, et plus particulièrement après 1945. Les évolutions morphologiques (augmentation du nombre de chercheur·e·s et de candidat·e·s aux métiers de la recherche), institutionnelles (structuration des études en filières, diplômes, etc., développement et multiplication des universités et des organismes de recherche) et la professionnalisation (rationalisation du recrutement, procédures d’évaluation, etc.) des sciences sociales, et notamment de la sociologie (Houdeville 2007), se sont accompagnées d’une division croissante du travail scientifique. S’est ainsi opéré, comme le formule Bernard Lahire, un « double processus de dispersion [des] travaux » : d’une part, un « découpage disciplinaire » instituant une fragmentation arbitraire du monde social entre ce qui relèverait du droit, de la psychologie, de l’économie, des sciences de l’éducation, etc., et, d’autre part, un « découpage sous-disciplinaire », accentuant encore les divisions en instituant une pluralité de spécialités (Lahire 2012 : § 6). Les types de spécialisation sont eux-mêmes variés, comme on peut le constater en parcourant les titres des revues académiques francophones de sciences humaines et sociales : spécialisation selon les périodes historiques (Médiévales, Dix-huitième siècle, Revue d’histoire du xixe siècle, Vingtième Siècle. Revue d’histoire, etc.), selon les aires géographiques (Cahiers d’études africaines, Cahiers d’Outre-Mer, Cahiers du monde russe, Rives méditerranéennes, etc.), selon les écoles théoriques (Actuel Marx, La Clinique lacanienne, Le Journal de l’école de Paris du management, Rue Descartes, etc.), selon les objets d’étude (Revue d’économie du développement, Cahiers du genre, Revue française de socio-économie, Cahiers internationaux de psychologie sociale, etc.) ou encore selon les thématiques (Archives de sciences sociales des religions, Histoire de l’éducation, Retraite et société, Sociologie du travail, etc.). Parmi ces différentes formes de « découpage sous-disciplinaire », le découpage par thématiques semble être le plus caractéristique de la sociologie. Il se manifeste en effet particulièrement dans l’organisation interne des diverses associations nationales et internationales de chercheur·e·s en sociologie, divisées en plusieurs dizaines de « réseaux thématiques » (AFS1), « comités de recherche » (AISLF2), « comités de investigación » (FES3), « grupos de trabajo » (ALAS4), « research networks » (ESA5), « study groups » (BSA6), « research committees » (ISA7) ou autres « sections » (ASA8), très majoritairement9 consacrés à une thématique particulière, telle que la sociologie de la famille, des médias, de l’environnement, du sport, de la santé, etc.

  • 10 « Sociology of Culture » (ou « Cultural Sociology ») n’est toutefois pas l’équivalent de la « socio (...)
  • 11 Il y a aussi des revues plus spécialisées encore, telles que la revue belge COnTEXTES. Revue de soc (...)

2La sociologie de l’art et de la culture est l’un des multiples produits de cette division du travail scientifique. En tracer la genèse, et ainsi éclairer, sinon le processus de « disciplinarisation » (Gingras 1991 : 43), du moins le processus d’autonomisation dont elle fait l’objet, conduit à remonter aux premières heures de l’histoire de la sociologie française, avec la création, dès 1900 dans L’Année sociologique, d’une rubrique de « sociologie esthétique » au sein de la section « Divers » (Sebbah 2005 : 550). Elle est aujourd’hui largement instituée, en France comme ailleurs, puisqu’on la retrouve autant au sein de l’AFS (RT14 « Sociologie des arts et de la culture »), de l’AISLF (CR18 « Sociologie de l’Art et de la Culture »), de la FES (CI18 « Sociología de la Cultura y de las Artes »), de l’ALAS (GT30 « Sociología del Arte y la Cultura »), de l’ESA (quoique scindée en deux entre le RN2 « Sociology of the Arts » et le RN7 « Sociology of Culture10 »), de la BSA (« Sociology of the Arts’Study Group », sans qu’il y ait de groupe explicitement consacré aux recherches sur la culture), de l’ISA (RC37 « Sociology of Arts », qui inclut explicitement les recherches sur la culture) que de l’ASA (section « Sociology of Culture », qui inclut inversement la sociologie de l’art). Elle a aussi ses revues (Sociologie de l’Art-OPuS en France, American Journal of Cultural Sociology aux États-Unis, Cultural Sociology au Royaume-Uni, Poetics aux Pays-Bas, Studi Culturali en Italie, etc.11), ses ouvrages de synthèse (voir notamment Heinich 2001 ; Alexander 2003 ; Béra & Lamy 2003 ; Fleury 2006 ; Péquignot 2009 ; Stewart 2013 ; Détrez 2014 ; Ravet 2015 ; Rodríguez Morató & Santana Acuña 2017), ses évènements scientifiques, ses diplômes (masters en médiation, en management ou en gestion de la culture, intégrant des enseignements de sociologie de la culture), son personnel (postes fléchés, axes spécialisés des laboratoires, etc.) – tous ces éléments contribuant à la « formation d’une identité sociale » (Gingras 1991 : 43) de sociologue de l’art et de la culture. Vue sous cet angle, la sociologie de l’art et de la culture semble constituer, au moins de prime abord, un sous-champ au sein du champ académique, avec ses agents, ses lieux, ses institutions et donc aussi possiblement, comme tout espace de pouvoir, ses ressources spécifiques et ses principes de hiérarchisation (Bourdieu 1984). Cette hypothèse, régulièrement avancée tant par celles et ceux qui s’en félicitent que par celles et ceux qui le déplorent, reste toutefois à interroger.

1. Questionner l’autonomie de la sociologie de l’art et de la culture

3Dans le prolongement de la réflexion de Durkheim considérant que « l’unité de la science se perd à mesure que le travail scientifique se spécialise » (Durkheim 2013 [1893] : 415), on peut se demander si la sociologie de l’art et de la culture ne doit pas être considérée comme le produit d’une « forme anormale » de division du travail scientifique. Si le présent dossier n’a pas pour objet d’apporter une réponse définitive à cette interrogation, il entend néanmoins la nourrir en présentant des cas de mise en question des frontières institutionnelles existantes, entre disciplines et au sein même de la sociologie. Partant, il n’a pas vocation à donner une définition opératoire de la sociologie de l’art et de la culture, et encore moins à justifier la manière dont les découpages interdisciplinaires et intradisciplinaires partitionnent le travail scientifique, mais au contraire de rendre compte du fait que la frontière d’un espace social « n’est pas une ligne réelle inscrite dans la réalité, marquée par un fossé ou une barrière. [Elle] est l’objet d’un combat » (Bourdieu 2013 : 18). Loin d’être naturelles ou immuables, les limites entre disciplines et entre spécialités sont le produit d’une histoire et d’un arbitraire, et peuvent être à tout instant, au moins marginalement, refondées. La difficulté d’une telle entreprise épistémologique réside dans le fait qu’interroger ces délimitations, c’est déjà les combattre, et par là prendre position ‒ quand ces prises de position et les intérêts qui les fondent appellent précisément à être analysés.

  • 12 À côté de ces manifestations scientifiques, on peut citer aussi l’article de synthèse de Bruno Péqu (...)

4Les retours réflexifs sur la sociologie de l’art et de la culture, son histoire et ses usages, n’ont pas manqué ces trente dernières années. D’une certaine manière, ce dossier prend sens et se place dans le sillon ouvert, au moins depuis le premier colloque international de sociologie de l’art qui s’était tenu à Marseille en 1985 (Moulin 1999), lui-même prolongé notamment par le premier congrès de l’AFS à Villetaneuse en 2004 (Girel 2006), par le colloque international de Grenoble en 2005 (Le Quéau 2007) et par le deuxième congrès de l’AFS à Bordeaux en 2006 (Girel & Proust 2007)12. Ces événements scientifiques et les publications qui en sont issues, toutefois, avaient pour objectif de « construire la spécificité sociologique » (Moulin 1999 : xv) et de contribuer à la constitution de la sociologie de l’art (« et de la culture » à partir de 2004, d’après Bruno Péquignot, in Girel 2006 : 11) en tant que « segment de la discipline » ou « sociologie régionale » (Moulin 1999 : xi-xiii). De la même manière, les auteurs et autrices de manuels et d’articles de synthèse sur la spécialité utilisent différents termes pour désigner cet ensemble de travaux sociologiques : « domaine » (Péquignot 2005 : 326 ; Heinich 2001 : 5), « sous-discipline » (Péquignot 2005 : 326), « discipline » (Heinich 2001 : 3 et 7), voire « discipline à part entière » (Heinich 2001 : 109). Autrement dit, l’enjeu pour leurs organisateurs et organisatrices était en partie de tracer les frontières permettant de réunir un ensemble de recherches relativement diverses, portant sur les artistes, les intermédiaires, les publics, la réception, les politiques culturelles, etc., et de le faire exister comme sous-champ disciplinaire.

5C’est précisément ce processus d’autonomisation, peu questionné par ses artisan·e·s-mêmes, qu’entendait interroger le colloque qui s’est tenu à la Sorbonne en novembre 2014 : « La “sociologie des arts et de la culture” et ses frontières. Esquisse pour une auto-analyse », à l’initiative des membres du Bureau du réseau thématique 14 de l’AFS, en partenariat avec le réseau thématique « Sociologie des intellectuels et de l’expertise » (Réseau thématique 27 [RT27]) et avec l’Association pour le développement de l’histoire culturelle (ADHC). Le présent dossier, coordonné par deux membres du comité scientifique de ce colloque, rassemble des contributions qui y ont été présentées13. À l’occasion de ce colloque, les chercheur·e·s avaient été appelé·e·s à questionner la sociologie de l’art et de la culture sous l’angle, double, « des frontières qui bornent et traversent la spécialité14 », c’est-à-dire à la fois les frontières extérieures (la sociologie de l’art et de la culture au sein de la sociologie et de l’ensemble des sciences humaines et sociales) et les frontières intérieures (notamment entre sociologie de l’art, focalisée sur la production et le travail artistiques, et sociologie de la culture, focalisée sur la consommation et la réception des œuvres)15. Si les deux questionnements sont complémentaires, nous avons fait le choix de centrer ce dossier sur la problématique encore peu étudiée de la transgression des frontières extérieures de la sociologie de l’art et de la culture ‒ celle des frontières intérieures ayant donné lieu récemment à quelques publications16.

Illustration 1. L’affiche du colloque de 2014 sur les frontières disciplinaires (internes et externes) de la sociologie de l’art et de la culture.

Illustration 1. L’affiche du colloque de 2014 sur les frontières disciplinaires (internes et externes) de la sociologie de l’art et de la culture.

Source : réseau thématique 14 de l’AFS

2. Divisions disciplinaires et conditions de l’interdisciplinarité

  • 17 « Divisions en “sociologies spécialisées” (politique, travail, éducation, famille, etc.), qui doive (...)

6On peut considérer que ces frontières extérieures sont de deux ordres, qui posent des questions méthodologiques et épistémologiques différentes. Il s’agit d’abord, de manière assez classique en sociologie des sciences, de questionner les frontières disciplinaires et les conditions de l’interdisciplinarité (voir notamment Larivière & Gingras 2014 et le n° 210 des Actes de la recherche en sciences sociales, dont Prud’homme & Gingras 2015). Il est en effet généralement admis qu’un certain nombre de divisions disciplinaires relèvent davantage de logiques académiques ou politiques que d’une nécessité épistémologique17. N’en va-t-il pas ainsi de la sociologie de l’art et de la culture par rapport, par exemple, à l’histoire culturelle, à l’histoire de l’art ou aux études littéraires ? Plus encore, comme l’indiquaient déjà Pierre Bourdieu, Jean-Claude Chamboredon et Jean-Claude Passeron :

La recherche scientifique s’organise en fait autour d’objets construits qui n’ont plus rien de commun avec les unités découpées par la perception naïve. [...] Plus généralement, c’est parce qu’elle se représente la division scientifique du travail comme partition réelle du réel que l’épistémologie empiriste conçoit les rapports entre sciences voisines, psychologie et sociologie par exemple, comme conflits de frontière. (Bourdieu, Chamboredon, Passeron 1968 : 59-60)

7C’est pourquoi certains sociologues, à l’instar de Norbert Elias ou de Pierre Bourdieu, inscrivent leur système de pensée dans un espace qui tend à s’affranchir, au moins partiellement, des découpages arbitraires mais routinisés des institutions académiques qui imposent leurs limites artificielles à la construction de l’objet. Ils invitent les chercheur·e·s à l’« in-discipline » (Charpentier & Dubois 2005) au double sens du terme : d’une part, ne pas s’enfermer dans une seule discipline mais puiser dans tous les savoirs qui peuvent être utiles (qu’ils relèvent de la sociologie, de l’histoire, de la psychologie, de la science politique, de la philosophie, des sciences de l’éducation, etc.) et oser, d’autre part, la transgression des frontières instituées.

8Malgré les apparences, cette entreprise d’affranchissement des cadres institutionnels s’avère très éloignée des injonctions bureaucratiques à l’interdisciplinarité (Fabiani 2012, 2013 ; Heilbron & Gingras 2015), liées aux politiques de la recherche et donc aux nouvelles opportunités de financement (Pélisse 2018), qui constituent une forme d’hétéronomisation du champ scientifique appelant à mettre la recherche au service d’intérêts pratiques, le plus souvent économiques (Prud’homme & Gingras 2015), et qui tendent à ne produire qu’une « interdisciplinarité cosmétique » (Sperber 2003). Quoiqu’en laissent penser ces appels répétés à la transgression généralisée des frontières disciplinaires, l’interdisciplinarité reste en effet aujourd’hui « une pratique bien limitée » (Heilbron & Bokobza 2015 : 121) et un discours plus prescriptif que descriptif porté sur le champ académique, encore manifestement structuré par les divisions disciplinaires. Car les disciplines universitaires ne produisent pas seulement de la connaissance, elles produisent aussi des façons de faire de la recherche : elles consistent en des manières de poser les questions, de construire l’objet, de traiter les matériaux d’enquête, d’administrer la preuve, etc., qui rendent l’exercice de l’interdisciplinarité difficile. À ce titre, le « système des disciplines » (Boutier, Passeron, Revel 2006) présente également des vertus heuristiques, et plus encore incrémentales : l’organisation de la science en disciplines permet la cumulativité, la corroboration et la réfutabilité des résultats de recherche, conditions de leur scientificité (Popper 1973 [1935]).

9Inviter à l’« in-discipline », ce n’est donc pas appeler à la fin des disciplines à l’instar de certains discours incantatoires sur la « transdisciplinarité » (voir par exemple Nicolescu 1996 ; Nowotny et al. 2001) ; c’est prendre conscience de l’existence de ces limites disciplinaires et des entraves qu’elles peuvent constituer pour la compréhension du monde social, et envisager la pertinence et les conditions de possibilité de leur dépassement ‒ ne serait-il que partiel ou occasionnel.

3. Divisions entre spécialités et cloisonnements thématiques

10Il s’agit ensuite, de manière complémentaire, de questionner les frontières intradisciplinaires et la clôture des problématiques sur « un ordre spécial de problèmes » ‒ pour reprendre l’expression de Durkheim. Cette interrogation, si elle est encore trop rare, n’est pas absente des réflexions scientifiques menées dans différentes spécialités sociologiques. En sociologie du travail par exemple, le plus institué des domaines de recherche sociologique en France, on insiste, surtout ces dernières années, sur l’importance d’interroger les frontières extérieures ‒ histoire, droit, anthropologie, économie, ergonomie, etc. (Erbès-Seguin 2010) ‒ mais aussi intérieures de ce champ d’étude. Étudier le travail ne peut ainsi se faire totalement sans « décloisonner la sociologie du travail » (Avril et al. 2010 : 9-10), c’est-à-dire notamment sans dialoguer avec la sociologie de la famille, la sociologie du temps libre et des loisirs, la sociologie du genre et des classes sociales, etc. De même, si les autrices et auteurs des premiers manuels français de sociologie de l’art et/ou de la culture interrogeaient peu ces frontières entre les différentes spécialités de la sociologie, Christine Détrez pose très explicitement la question dès l’introduction de son récent ouvrage de synthèse :

Si les limites entre questionnements et thématiques sont arbitraires, l’encastrement de divers champs de la sociologie est manifeste en sociologie de la culture. Comment fixer la limite du périmètre accordé à la sociologie de la culture, et tracer des frontières avec, par exemple, la sociologie de l’art ? La sociologie du travail et des professions ? La sociologie des œuvres ? La sociologie des politiques culturelles ? La sociologie du public ou des publics ? La sociologie des loisirs ? La sociologie des médias ou celle de la communication, celle de la consommation ou de la réception, sans même évoquer toutes les études consacrées à telle ou telle section de la sociologie de la culture que sont par exemple la sociologie de la lecture, de la télévision, etc. ? (Détrez 2014 : 8)

  • 18 En France, l’entrée (puis la progression) dans la carrière nécessite d’inscrire son doctorat non se (...)

11De telles invitations au décloisonnement restent néanmoins assez peu fréquentes – une certaine routinisation des problématiques, à laquelle s’ajoutent des logiques de professionnalisation18, conduisant à s’inscrire, plus ou moins consciemment et plus ou moins formellement, dans une (ou au croisement de plusieurs) spécialité(s).

4. Approches empiriques et approches réflexives

12Ces frontières, interdisciplinaires et intradisciplinaires, doivent être interrogées à un double niveau : d’une part, de manière empirique, à partir de recherches sur des sociologues d’une spécialité donnée et sur leurs pratiques transgressives ou conservatrices à l’égard des frontières intradisciplinaires ; d’autre part, de manière réflexive, à partir de recherches situées à la croisée de plusieurs approches théoriques. Ces deux dimensions s’avèrent indissociables : si l’approche réflexive permet de mettre en évidence le caractère heuristique des transgressions intra et interdisciplinaires, les approches sociologique et historique (voire socio-historique) rendent compte des conditions de possibilité de ces transgressions. Ce n’est qu’au prix d’une meilleure compréhension des logiques des clôtures (intra)disciplinaires que pourront s’opérer les passages de frontière les plus transgressifs et, par-là peut-être, les plus pertinents.

13C’est pourquoi chacun des articles de ce dossier contient des éléments autobiographiques, parfois (Samuel Coavoux, Rémi Deslyper) sous la forme d’un encadré dans lequel les auteurs portent un regard réflexif sur les conditions qui ont rendu possibles les transgressions qu’ils réalisent. Ce petit exercice d’auto-analyse met en évidence le fait que ces questions ne sont pas abstraites : elles se posent dans la pratique même de la recherche, de la construction de l’objet à l’interprétation des résultats en passant par la conception et la mise en œuvre du protocole d’enquête et des outils méthodologiques.

Illustration 2. Hermès, « dieu des frontières » (Siebert 2001)

Illustration 2. Hermès, « dieu des frontières » (Siebert 2001)

Source : photo de David Cohen, prise à la Villa Hermès (Autriche), 2018.

  • 19 Nous soulignons.

14La première originalité de ce dossier est de réunir des articles qui étudient directement des frontières qui sont à la fois intradisciplinaires et interdisciplinaires. Les premier·e·s contributeurs et contributrices ont été invité·e·s à « prendre [les spécialités de recherche] pour objet, c’est-à-dire enquêter sur la division du travail académique, ses fondements et ses modalités d’institutionnalisation et questionner aussi bien les frontières entre les domaines de savoir que ses différenciations internes19 » (Heilbron & Gingras 2015 : 9). C’est ce que font Géraldine Bois et Adrien Thibault, respectivement inscrit·e·s en sociologie et en science politique, en analysant dans quels « réseaux thématiques » évoluent les communications sur l’art et la culture aux congrès de l’Association française de sociologie, ainsi qu’en portant attention aux propriétés des communicant·e·s (et notamment à leur inscription disciplinaire). C’est également le cas de Lucile Dumont, inscrite en sociologie à l’EHESS, qui retrace la mutation disciplinaire de l’objet littéraire, depuis la sociologie vers les théories littéraires, à l’École des hautes études (EPHE/EHESS).

  • 20 Comme il avait pu le faire précédemment dans une autre contribution à propos de l’enseignement de l (...)

15La seconde originalité de ce dossier est de réunir des articles au croisement d’une spécialité sociologique et d’autres disciplines, questionnant ainsi dans un même mouvement – non plus dans une démarche de sociologie de la sociologie mais en partant de différents terrains d’enquête sur l’art et la culture ‒ frontières intradisciplinaires et frontières interdisciplinaires. Dans son entretien avec Séverine Sofio, l’historienne Julie Verlaine montre comment, dans ses propres travaux de recherche sur les galeries d’art en France entre 1945 et la fin des années 1960 (Verlaine 2013), elle s’est nourrie et inspirée des travaux pionniers de la sociologue Raymonde Moulin pour mettre en œuvre une « méthodologie mixte », empruntant à la fois à l’histoire (culturelle) et à la sociologie (de l’art). Stéphane Bonnéry, chercheur en sciences de l’éducation, invite quant à lui, à partir d’une enquête sur les pratiques de lecture d’albums de jeunesse, non seulement à faire dialoguer sociologie de la culture et sociologie de l’éducation20, mais également à prolonger le dialogue avec les sciences de l’éducation, l’histoire de la littérature, les études littéraires, etc.

16La troisième et dernière originalité de ce numéro est de réunir des articles dont la problématique emprunte à la sociologie de l’art en même temps qu’à d’autres spécialités. Contrairement par exemple à un récent numéro de Genèses (2016/2), qui faisait dialoguer sociologie de l’art, sociologie de l’artisanat et sociologie du sport par la juxtaposition d’articles « spécialisés », ce dossier convoque des recherches empiriques irréductibles à une spécialité. Dans la lignée cependant de ce même numéro, les transgressions qu’il propose restent relativement inhabituelles : si, comme l’article de Géraldine Bois et d’Adrien Thibault le montre, l’art et la culture se retrouvent souvent à l’Association française de sociologie au sein des réseaux thématiques de sociologie des intellectuels et de sociologie du travail, ils sont bien moins présents – sans être pour autant absents – des réseaux de sociologie du sport, de sociologie politique et de sociologie de l’éducation. Souhaitant réencastrer, comme y conviait Pierre Bourdieu, la sociologie de la culture dans la sociologie des styles de vie, Samuel Coavoux, chercheur en sociologie, retrace et relance la circulation du concept de compétence entre les terrains de l’art et du politique, contribuant par là même à favoriser le dialogue entre sociologie de la culture et science politique. Enfin, Rémi Deslyper, docteur en sociologie et maître de conférences en sciences de l’éducation, souligne l’intérêt de recourir aux travaux de sociologie de l’éducation sur un terrain relevant pourtant en apparence de la sociologie de l’art, en l’occurrence celui des guitaristes de « musiques actuelles ». Son recours au concept de « forme scolaire » (Vincent 1980, 1994), qui circule assez largement entre la sociologie et les sciences de l’éducation, permet de situer son approche à la croisée de disciplines et de spécialités qui se rencontrent peu sur des objets tels que les pratiques artistiques et culturelles.

17Les cinq articles et l’entretien qui constituent ce dossier posent ainsi une question fondamentale à la sociologie de l’art et de la culture : celle des « pernicieux effets de la spécialité exagérée » (Comte 1975 [1830] : 31) et du risque d’atrophie du « versant généraliste » (Caillé 2011) de la discipline sociologique, sinon celle de la pertinence d’une « partition réelle du réel » (Bourdieu et al. 1968 : 60) comme principe de division du travail scientifique. Les frontières extérieures dont traite ce dossier, qu’elles soient interdisciplinaires ou intradisciplinaires, sont finalement des limites au double sens du terme : possiblement trop poreuses, possiblement trop hermétiques, elles menacent le travail scientifique d’autant plus fortement qu’elles restent méconnues et d’autant plus longtemps qu’elles restent impensées.

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Notes

1 Association française de sociologie.

2 Association internationale des sociologues de langue française.

3 Federación Española de Sociología.

4 Asociación Latinoamericana de Sociología.

5 European Sociological Association.

6 British Sociological Association.

7 International Sociological Association.

8 American Sociological Association.

9 À l’AFS, par exemple, seuls 12 « réseaux thématiques » sur 50 (moins d’un sur quatre) ne concernent ni une thématique ni un espace social en particulier.

10 « Sociology of Culture » (ou « Cultural Sociology ») n’est toutefois pas l’équivalent de la « sociologie de la culture » française, sinon francophone, car son périmètre est beaucoup plus étendu. Comme on peut le lire par exemple, en date du 1er mai 2018, sur la page de présentation du RN7 de l’ESA : dans le contexte anglo-américain, « le terme Culture doit être interprété dans son sens le plus large pour inclure les pratiques et les produits culturels, les idées, ainsi que les significations symboliques ».

11 Il y a aussi des revues plus spécialisées encore, telles que la revue belge COnTEXTES. Revue de sociologie de la littérature, participant d’un degré élevé de division du travail en sociologie.

12 À côté de ces manifestations scientifiques, on peut citer aussi l’article de synthèse de Bruno Péquignot (2005) et la thèse d’Emmanuelle Sebbah (2006).

13 Au-delà, ce numéro trouve son origine la plus immédiate dans les questionnements soulevés par l’appel à communication de ce colloque. Il est donc à cet égard redevable des contributions diverses des membres du comité scientifique de l’évènement, qui ont été formulées lors de la rédaction de cet appel.

14 Cf. argumentaire du colloque « La “sociologie des arts et de la culture” et ses frontières ».

15 Pour être tout à fait exhaustifs, précisons que l’appel à communication questionnait également les rapports des sociologues de l’art et de la culture à leurs objets (entre sociologues, amateurs d’art et artistes, entre approches critiques et approches esthètes, etc.), soit un autre type de « frontière extérieure » de la sociologie de l’art et de la culture.

16 Voir en particulier le numéro 181-182 des Actes de la recherche en sciences sociales sur « Les partitions du goût musical » dont les coordinateurs pointent autant les problèmes posés par « la dissociation entre une sociologie des producteurs et une sociologie de la réception » que la nécessité de « faire retour sur les héritages et leurs effets de limitation du possible » afin « d’étendre le questionnement et la palette des outils analytiques » (Lizé & Roueff 2010 : 6-7). Ce numéro faisait lui-même écho à une réflexion de Bernard Lahire, parue un an plus tôt, sur la complémentarité existant « Entre sociologie de la consommation culturelle et sociologie de la réception culturelle » (Lahire 2009).

17 « Divisions en “sociologies spécialisées” (politique, travail, éducation, famille, etc.), qui doivent sans doute plus aux découpages “ministériels” et aux commandes d’État qu’aux nécessités de la division du travail scientifique » (Mauger 1999 : 115) ; « la division disciplinaire dans le champ des sciences humaines et sociales rel[ève] plus du partage de territoire et donc de crédits et de postes, etc., que des nécessités épistémologiques » (Péquignot, in Girel 2006 : 30).

18 En France, l’entrée (puis la progression) dans la carrière nécessite d’inscrire son doctorat non seulement dans une discipline où l’on se doit d’être reconnu par ses pairs (à travers la qualification par le Conseil National des Universités), mais aussi dans une spécialité particulière, ce qui peut impliquer notamment d’être membre d’un « réseau thématique », de participer à des séminaires autour de son objet, de publier dans des revues du domaine et de communiquer dans des colloques ‒ en bref, de devenir un.e spécialiste.

19 Nous soulignons.

20 Comme il avait pu le faire précédemment dans une autre contribution à propos de l’enseignement de la musique (Bonnéry 2013).

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Table des illustrations

Titre Illustration 1. L’affiche du colloque de 2014 sur les frontières disciplinaires (internes et externes) de la sociologie de l’art et de la culture.
Crédits Source : réseau thématique 14 de l’AFS
URL http://journals.openedition.org/bssg/docannexe/image/281/img-1.png
Fichier image/png, 1,4M
Titre Illustration 2. Hermès, « dieu des frontières » (Siebert 2001)
Crédits Source : photo de David Cohen, prise à la Villa Hermès (Autriche), 2018.
URL http://journals.openedition.org/bssg/docannexe/image/281/img-2.png
Fichier image/png, 1,4M
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Pour citer cet article

Référence électronique

Jérémy Sinigaglia et Adrien Thibault, « Questions d’in-disciplines »Biens Symboliques / Symbolic Goods [En ligne], 3 | 2018, mis en ligne le 15 octobre 2018, consulté le 29 mars 2024. URL : http://journals.openedition.org/bssg/281 ; DOI : https://doi.org/10.4000/bssg.281

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Auteurs

Jérémy Sinigaglia

Université de Strasbourg/Laboratoire Sociétés, acteurs, gouvernement en Europe (Sage)

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Adrien Thibault

Université de Strasbourg/Laboratoire Sociétés, acteurs, gouvernement en Europe (Sage)

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